top of page
Photo du rédacteurSophia

Faire la paix avec ma césarienne.

Choisir ou non une naissance par césarienne, c’est un deuil.
cicatrice césarienne

Certains croient que donner naissance par césarienne est plus facile. Même, diront-ils, que ce n’est pas un accouchement « normal » étant donné qu’il n’est pas naturel. Laissez-moi vous raconter mon histoire.


Pour moi, accoucher par césarienne a été un des plus grands deuils que j’ai eu à vivre dans la séquence des dernières années.

Avec une grossesse gémellaire, je savais qu’il y avait plus de risques que ça se termine en césarienne. Pourtant, ce n’est pas systématiquement ce qui arrive. Et j’ai voulu y croire de toutes mes forces !

Une césarienne, c’est une autre façon de donner naissance.

Ce qu’un utérus peut tolérer dépasse encore largement ma compréhension !

Dans cette procédure, l’utérus est coupé, ouvert, étiré, pénétré, vidé de son contenu, manipulé, refermé, recousu et laissé à lui-même en espérant une guérison rapide et sans complication. Tout ça, bien sûr, après avoir passé les 9 derniers mois à fabriquer, à porter, à s’étirer au maximum et même à tenter d’expulser 2 petits êtres humains et les placentas qui viennent avec.


Ce n’est quand même pas rien !


J’ai longtemps cru que c’était un échec, que je n’ai pas été capable d’accoucher « par moi-même ». Mais c’est faux.

J’ai toujours su !

J’ai su, après cette nuit de pleine lune du mois de septembre, que c’était le moment. J’ai senti l’appel. J’ai senti que je n’y arriverais pas seule.

Il faisait encore nuit quand j’ai été réveillée par une forte contraction. La première depuis plusieurs heures. Cela faisait plusieurs jours que je vivais des épisodes de fortes vagues irrégulières, mais bien présentes et envahissantes.

On y était. J’étais en train d’enfanter. Mes enfants me donnaient les signaux, ils voulaient naître. C’était clair.

Et je savais comment enfanter, j’étais bien préparée. Pourtant, le combat que je menais à ce moment précis était loin de celui pour lequel je m’étais tant préparée. Mais c’était bien le mien, j’entrais dans mon vortex de naissance. C’était comme ça que mon histoire était en train de s’écrire.

Dans chaque naissance, une femme meurt pour renaître mère.
maman jumeaux

Il m’a fallu frôler la mort une première fois, pour en arriver à percevoir toute la résistance qui m’habitait.

J’avais besoin d’aide. Quelque chose d’anormal se produisait dans mon corps et même si je n’étais pas prête à l’accepter, il me fallait au moins l’admettre.

Accepter de se diriger vers l’hôpital représentait pour moi, me livrer à l’abattoir. J’en avais une hantise. J’ai tellement tout fait pour l’éviter. Mais il y a tant de choses sur lesquelles on n’a aucun contrôle.

Alors ce matin-là, j’ai su que je n’accoucherais pas à la maison. Il était 5 h quand j’ai appelé à l’hôpital pour leur annoncer mon arrivée dans les prochaines heures, comme on annonce une reine qui débarque à l’improviste dans un village.

J’ai senti la fébrilité de l’équipe médicale au bout du fil, elle n’était pas prête. Un accouchement de jumeaux nécessitait de sa part une gestion et une organisation complète.

J’ai préparé mon dossier, mes valises et une immense glacière pour une semaine.

Lâcher prise, finalement, sur mon plan a été un des plus grands instants de ma vie. Admettre mon impuissance, sentir mon corps qui faiblissait de jour en jour, d’heure en heure depuis déjà plusieurs semaines.

Rien n’indiquait qu’un travail naturel et spontané se déclencherait, prochainement.

En termes médicaux, j’étais en prééclampsie sévère. Mais entre nous, j’étais à deux doigts de la mort. Je le sentais.

Je remercie la vie régulièrement pour ce contact si précieux que j’ai avec mon corps. Je l’ai souvent poussé à bout. J’ai su repousser mes limites maintes et maintes fois. Cette fois-ci était particulièrement intense.

Et puis, il y a eu ce point où j’ai su que c’était assez, que si je n’allais pas trouver de l’aide maintenant, il serait trop tard. J’allais le regretter.

3 vies étaient en jeu. Le temps de la rébellion était dépassé.

Vers midi nous passions la porte de l’hôpital.


Juste avant de sortir de la voiture, j’ai eu une dernière conversation avec ma doula en qui j’avais pleinement confiance. Elle me rappela que j’avais le choix, que j’avais des options. Mais rendu là, ma décision était déjà prise, ne restait qu’à l’assumer. Mes enfants allaient naître par césarienne. C’était une certitude.


Quand la césarienne devient la seule option acceptable.
femme enceinte couchée

J’étais tellement immense. Une baleine ! 70 livres en extra ! Je ne dormais plus, je ne mangeais presque rien. J’étais au bout de mes propres forces.

Ce jour-là, la faiblesse avait atteint un point où j’étais devenue incapable de bouger ou de marcher sans une douleur insupportable. Cette douleur ressentie au centre de mon bassin me faisait pleurer constamment.

Sans compter tout le reste ; les brulements d’estomac, la diarrhée, les jambes et les pieds gorgés d’eau. Et je ne parle même pas des contractions !

Pourtant, j’étais maîtresse de mon enfantement. J’étais dans un espace de clarté absolue, et je sentais que ce pouvoir était mien.

Si j’étais là, c’était parce que j’étais prête à ce qu’on me prenne en charge. Par contre, ce serait selon mes conditions.


La césarienne était bien la dernière option mentionnée dans mon plan de naissance.

C’est pourtant ce que j’ai réclamé dès ma première discussion avec la gynécologue. Elle m’a regardé comme si j’étais folle.


Sachez qu’il était inconcevable dans ma condition que j’accepte une quelconque induction pour déclencher le travail. Je connaissais trop bien la cascade d’interventions qui s’ensuivrait.


Il était hors de question de me faire subir tout ça, sachant qu’il y avait aussi de fortes probabilités que j’aboutisse sur la table d’opération.


J’avais besoin de sentir que j’avais un certain contrôle. J’étais à l’aise avec le processus des chirurgies. J’étais consciente des risques.


Par contre, loin de me douter de l’ampleur de ce qui m’attendait à la suite de cette opération.

Tout d’un coup, j’étais mère de 2 bébés !
maman et bébés césarienne

Les premières 24h ont été horribles ; un de mes bébés était aux soins intensifs pendant plusieurs heures, et pour ma part ; j’ai eu une hémorragie post-partum, une anémie sévère, et j’ai reçu 2 transfusions sanguines. Il s’en est suivi un début d’allaitement laborieux.


J’étais clouée au lit et j’avais peine à m’occuper de 2 nouveaux nés. C’est dire à quel point j’étais faible et très peu consciente de ma nouvelle réalité de mère.


On était à des années lumières de l’enfantement rêvé que j’ai tant visualisé durant ces 9 derniers mois. C’est tout un rêve qui venait de s’écrouler dans mon cœur.


Quand le choc fait place à la colère et la tristesse…
ventre post-partum

Dans les mois qui ont suivi cet enfantement, j’ai ressenti énormément d’incompréhension, de colère et de tristesse.


À la fois, je m’adaptais à ma nouvelle réalité de maman de jumeaux, à la fois, je tissais le deuil de mon accouchement vécu par césarienne.

Parce que même si c’était la meilleure décision du moment, n’en reste pas moins que c’était loin d’être ce que je souhaitais.


Il m’a fallu presque 2 ans pour en venir à me pardonner. Pardonner mon corps, pardonner mes enfants et pardonner Dieu.

Parce qu’en cherchant des réponses, je me suis blâmée, moi et mon corps, de ne pas avoir su enfanter mes enfants. J’ai blâmé mes enfants de ne pas être arrivés avant, de manière naturelle. J’ai blâmé Dieu de m’être retrouvée à vivre le cauchemar que je redoutais tant.


Et puis, la paix est venue avec l’acceptation.

Comment j’en suis venue à être fière de la tournure des évènements ?


Je me suis rappelé la mission première de cette grossesse : faire tout en mon pouvoir pour amener à terme et en santé ces 2 êtres humains.


À 38.3 semaines, c’était pour moi un véritable exploit. C’était une grande mission, accomplie. Je pouvais dire que j’avais fait ma part.


En plus, il y a eu toute la préparation accomplie en amont avec l’aide de ma doula et des préparations virtuelles à la naissance de Quantikmama. Sans elles, rien n’aurait été pareil dans cette aventure. C’est ce qui a fait toute la différence.


Cette préparation et l’accompagnement reçus m’ont amené à croire suffisamment en moi et en la sagesse que je portais pour prendre mes propres décisions. De cette confiance est née tout mon pouvoir. D’où l’importance d’être bien préparée et solidement accompagnée.


La sagesse et l’instinct.
cicatrice césarienne

L’instinct d’une femme qui porte la vie dans son ventre va bien au-delà de ce que j’aurais pu imaginer.


Avec le recul, je réalise que j’ai su être à l’écoute de mon instinct à tout moment. Je savais, je sentais ce qui se passait dans mon corps. J’étais entièrement à l’écoute de la sagesse que je portais au creux de mon ventre depuis les derniers mois. Et j’ai su quand le moment est venu de me tourner vers la science. Grâce à elle, aujourd’hui mes enfants sont en vie, en santé et ils ont une mère.


Finalement, la paix vient directement du fait d’accepter d’avoir tout fait en mon pouvoir. Que c’était exactement dans ces circonstances que mon histoire d’enfantement devait se dérouler et que j’en ai été l’actrice principale.


Aujourd’hui j’apprends encore à tisser ce deuil. Maintenant, avec une douceur infinie envers moi-même, envers mon corps, mon utérus et envers mes magnifiques enfants.


Et vous, c’est quoi votre histoire avec votre césarienne ?










Comments


bottom of page